Suite du "feuilleton" de la découverte de la tombe de Kasta, qui, je l'espère, n'est ni trop lassant, ni indigeste...

      Et ce n'est pas fini ! Encore un mois, a annoncé l'archéologue Katerina Peristeri, qui a aussi réaffirmé qu'il s'agit bien d'un tombeau macédonien.

     Ce nouveau dessin de l'architecte Mihalis Lefandzis nous permet de suivre l'avancée des fouilles : il apparaît désormais évident qu'il y a une quatrième chambre, voire plus.

La partie dégagée de la porte de la 3ème chambre (style ionique)

(le grec utilise le terme Θάλαμος) 

     A la différence des tombeaux macédoniens connus qui eux sont creusés dans la roche, celui de Kasta est  une construction, en calcaire et marbre de Paros, enfouie dans le sol et recouverte de terre formant tumulus, avec, à son sommet, la statue du lion, marque de force, d'énergie, de puissance "héroïques" et ne pouvant donc convenir qu'à un personnage important (ou plusieurs). Il semblerait néanmoins que la 4ème chambre serait creusée dans la roche.

    Les dimensions de ce tumulus sont impressionnantes : diamètre de 158,40m et hauteur de 23m. On s'en rendra encore mieux compte en les rapprochant de celles de l'Acropole d'Athènes dont la hauteur est de 70m et le diamètre  de 300m , seulement !

     Les dessins ci-dessous ont été faits par le peintre Gerasimos Gerolimatos publiés sur son site "Discours sur l'art"/ Περί Tέχνης ο λόγος : http://peritexnisologos.blogspot.gr

B = Nord

Lion+piédestal d'une hauteur supposée de 10m = 15,84m

Largeur de la façade du tombeau : 4,5-5m

En jaune, les 3 chambres

En orange : la supposée 4ème  chambre. Les chambres A,B et C (en grec A, Β, Γ) étaient emplies de terre. Les 3 flèches indiquent la possible voie empruntée par les éventuels pilleurs de tombeaux.

M.R.

On ne peut être insensible aux détails des orteils et du cothurne (sandale à semelle épaisse et à lanières).

      Trois rangées de pierres du mur se dressant devant les Karyatides ont pu être enlevées, dévoilant les deux statues dans leur totalité : 2,27m de hauteur soit 17 cm de plus que les Karyatides de l'Erechtéion sur l'Acropole. Elles reposent sur une base de 1,33x0,88 d'une hauteur encore indéterminée, puisque toute la terre n'a pas été dégagée.

     Le bruit court que deux plaques avec inscriptions en grec hellénistique* auraient été trouvées devant les Karyatides... rumeur démentie par le Ministère. Cette découverte expliquerait la fermeté avec laquelle l'archéologue responsable des fouilles, K. Peristeri, assure qu'il s'agit incontestablement d'un tombeau macédonien.

*Hellénistique se dit de tout ce qui a trait à l'après Alexandre Le Grand jusque la conquête romaine. On appelle aussi le grec hellénisque Koinê, ce qui signifie langue commune à tous les pays conquis par Alexandre

La porte qui ouvre sur la 3ème chambre ne peut être complètement dégagée, en raison des fortes poussées et du très mauvais état de la voûte.

      Il est donc primordial de la consolider, et ce n'est pas facile.

      Outre l'interrogation brûlante sur l'identité du ou des "résidents" de la tombe (si c'en est une !), d'autres questions se posent : pillée ou intacte ? Que contient cette 3ème chambre ? Y en a-t-il une autre ? Quel est le maître d'œuvre de ce monument impressionnant ?  Est-ce l'architecte attitré d'Alexandre, Dinocratès qui conçut le plan d'Alexandrie ? Ne faut-il pas voir dans la conception des tombeaux macédoniens l'influence de Platon (427-347) qui était aussi mathématicien et géomètre ? Cf Le Timée et Lois.

      Et la dernière en date des questions : monument macédonien ou romain ?

     Les tenants de cette proposition s'appuient sur le fait que dans aucun des tombeaux macédoniens ne furent trouvées ni caryatides ni sphinges, alors que, affirment-ils, ces motifs étaient à la mode chez les Romains et, ajoutent-ils, ce peut être un monument funéraire érigé en l'honneur des soldats romains qui tombèrent à Philippes ( proche d'Amphipolis) en 42 av. J.-C.  C'est là en effet que s'affrontèrent l'armée de Brutus et Cassius, les meurtriers de Jules César, et celle d'Octave et Marc Antoine qui remportèrent la victoire.* Surprenantes aussi, ces tonnes de marbre, alors que les tombeaux macédoniens sont construits en calcaire.

      Katerina Peristeri qui dirige les fouilles a déclaré le jeudi 18.09 que, pour elle, il n'y a aucun doute possible : c'est un tombeau macédonien, le lion de marbre originellement situé au sommet en étant la preuve irréfutable.

*La bataille fratricide de Philippes est une des batailles les plus importantes de l'histoire romaine. Elle met en présence des forces énormes : 80 000 soldats et 20 000 cavaliers du côté des républicains Brutus et Cassius, et 100 000 soldats et 13 000 cavaliers de l'autre. Les pertes furent énormes de chaque côté. Les vainqueurs édifièrent probablement un monument pour honorer leurs morts...

M.R.

     Hier, mercredi 10 septembre, les Karyatides ont commencé à dévoiler la splendeur des plis de leur vêtement : le mur qui obstruait l'accès a été en très grande partie dégagé. Des éléments de fronton portant encore des couleurs ont également été trouvés et mis à l'abri au musée d'Amphipolis.

     Les photos comme les informations sont transmis par le Ministère de la culture et du Sport.

Sources : Communiqués et photos du Ministère de la Culture et du Sport donnés à la presse.

     Dans la soirée du samedi 6 septembre, les archéologues en dégageant les terres sablonneuses qui obstruent le passage, sont "tombés sur"  deux magnifiques Karyatides* en marbre de Thasos. Elles aussi, comme les deux Sphinges de l'entrée, se posent en gardiennes du tombeau. Il est très probable en effet que de leurs bras, gauche pour l'une et droit pour l'autre, elles fassent un geste apotropaïque, c'est-à-dire d'interdiction d'entrée et de profanation.

     Le visage de celle gauche, leur coiffure, leur vêtement révèlent un art des plus consommés, qui rappelle bien sûr les Korê** trouvées sur l'Acropole d'Athènes et les Karyatides de l'Erechteion, toutes ces sculptures se trouvant au Musée de l'Acropole. On peut imaginer le ravissement des archéologues face à de telles trouvailles, et leur perplexité ! 1ère fois que l'on trouve des Karyatides dans un tombeau macédonien.

Sur cette photo, on peut admirer les détails de la coiffure, avec boucles et "anglaises", de même que celui du vêtement, collant au buste, dans un effet de "nu mouillé".

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*Karyatide / Cariatide / Καρυατίδα : statue de femmes soutenant une corniche ou une architrave. Quand ce sont des hommes, on parle d'Atlantes. Les Karyatides par excellence, sont celles du temple de l'Erechteion, sur l'Acropole. Les sculptures originales se trouvent au Musée de l'Acropole, à l'exception d'une qui est, sauf erreur de ma part, au British Museum...

Photo M.R.

**Korê, qui signifie "jeune fille", désigne une statue de femme typique de l'art dit archaique du VIème siècle av.J.-C., le pendant masculin étant le kouros, qui lui, se caractérise par ce que l'on appelle "nudité héroïque".