• Où l'on reparle d'Amphipolis...

          Mercredi 30 septembre, la responsable des fouilles de la tombe Kasta, l'archéologue Katerina Peristeri, invitée par les Anciens Etudiants de l'Université de Thessalonique à parler de ce monument, a fait, selon son habitude, des révélations fracassantes et péremptoires qui, comme précédemment, ont provoqué controverses et critiques plus ou moins sarcastiques dans le "milieu" de ses pairs et collègues, auxquels d'ailleurs elle ne s'adresse jamais directement et qui lui reprochent de n'avoir publié à ce jour aucun descriptif scientifique des fouilles et des recherches qui ont été faites. Lors de cette conférence, il n'y avait d'ailleurs que très peu d'archéologues, en revanche beaucoup d'habitants de la région d'Amphipolis et de Serrès, et de représentants de l'Eglise Orthodoxe...

           Katerina Peristeri a donc déclaré que la tombe Kasta avait été construite par l'architecte Deinokratès, sur ordre d'Alexandre, pour son ami Hephaistion / Ηφαιστίων, mort à 33 ans d'une appendicite aigüe ou de la fièvre typhoïde, à Ectabane, capitale de la Médie,

            Pour l'affirmer, elle s'appuie sur des documents épigraphiques, l'un trouvé là où se trouve actuellement le lion, une autre sur le mur d'enceinte, et une autre à l'intérieur de la tombe, soit une inscription parelabon / παρελαβον = j'ai reçu (très habituel qu'un monument funéraire "parle" à la 1ère personne), suivie d'un H, initiale de Herôon (lieu consacré à un humain divinisé) et également initiale de Hephaistion,  un ANT qui serait l'abréviation de Antigone Le Borgne qui aurait été chargé par Alexandre de faire édifier le monument, et le monogramme d'Héphaistion. Il y aurait encore d'autres monogrammes. Tout cela dit avec réserves, car il n'est vraiment pas facile de s'y retrouver dans les articles de presse...

           La tombe de Kasta ne serait donc pas une tombe à proprement parler, mais un cénotaphe destiné à célébrer , dans son pays natal, le culte d'Hephaistion héroïsé. 

    Où l'on reparle d'Amphipolis...

    Ce bas-relief trouvé à Pella (capitale de la Macédoine antique) et exposé au Musée Arhéologique de Thessalonique est une offrande à Hephaistion, héroïsé et donc devenu un intermédiaire entre les mortels et les Immortels.  C'est un certain Diogénès qui l'a offert au héros : ΔΙΟΓΕΝΗΣ ΗΦΑΙΣΤΙΩΝΙ ΗΡΩΙ. La jeune fille qui tient une oinochoé fait une libation.

    ***************

          Hephaistion est un personnage historique bien connu, ami-"amant"-compagnon d'Alexandre qu'il a accompagné dans son expédition orientale. Evidemment, comme tout ce qui touche Alexandre Le Grand et son entourage,  le romanesque est toujours présent !

            Hephaistion est né à Pella en -387 (Alexandre est né en -386) dans une famille macédonienne aristocratique. Les deux enfants, puis, jeunes gens, grandissent ensemble et suivront tous deux les cours d'Aristote.

     

    Où l'on reparle d'Amphipolis...

    Musée de Pella : Hephaistion et Alexandre chassant un lion

             Une amitié bien réelle les lie, qui deviendra vite légende : on raconte en effet que dès son arrivée sur le sol d'Asie, à Troie, Alexandre fit un sacrifice (ou déposa une couronne) sur le tombeau d'Achille et Hephaistion en fit de même sur le tombeau de Patrocle. Plus tard, après la bataille d'Issos, la famille royale perse est capturée : la reine, épouse de Darius III se prosterne devant Hephaistion qu'elle prend pour Alexandre tant il était beau ! Alexandre, pourtant si souvent ombrageux, loin de le prendre mal, aurait dit à la reine confuse : "C'est un autre Alexandre", mot qui rappelle ce que leur maître Aristote disait de l'amitié dans l'Ethique à Nicomaque (IX 9) : l'ami est un autre soi-même (τὸν δὲ φίλον, ἕτερον αὐτὸν ὄντα).

            Hephaistion fut aussi un chef militaire et "civil", promu aux plus hautes fonctions militaires et administratives, et fervent adepte de la politique de mélange, de fusion ( συγχώνευση) avec les populations conquises, en adoptant leur mode de vie et coutumes, en favorisant les mariages mixtes, ce qui avait aussi pour but de fixer les Grecs dans ces pays lointains et de consolider les conquêtes, tout en "hellénisant" - la langue de communication étant la langue grecque, ce qui sera par la suite la koinê, langue commune à tout ce territoire conquis par Alexandre, Basse-Egypte incluse. Mais cette politique était loin de faire l'unanimité dans l'entourage d'Alexandre et dans l'armée...

             A Suse, ils épousèrent deux sœurs, filles du défunt Darius puis s'installèrent dans l'opulente Ectabane où il fut emporté par une infection en -324. La douleur d'Alexandre fut immense, à l'égal de celle d'Achille à la mort de Patrocle, et à l'instar du héros homérique, il resta trois jours sans manger, sans dormir. Le corps fut ensuite transporté à Babylone où il fut incinéré sur un bûcher grandiose. Ordre fut donné à Deinokratès de construire le bûcher le plus luxueux qui fut jamais édifié, un monument à cinq étages, ruisselant d'or et pour lequel il fallut même démolir une partie des remparts de Babylone. Alexandre avait l'intention de faire de cette ville la capitale de son empire.

             Huit mois plus tard, le 13 juin -323, Alexandre était emporté à son tour par une fièvre violente. Provoquée par un poison ?... Son tombeau n'est toujours pas localisé. Madame Peristeri les verrait bien tous les deux dans la tombe Kasta ou tout au moins que la tombe Kasta fut édifiée en leur honneur...

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  • Commentaires

    1
    thaletas
    Mercredi 7 Octobre 2015 à 23:20
    Si je ne me trompe pas, le relief dédié à Héphaistion héroïsé se trouve au Musée de Thessalonique.
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    2
    Jeudi 8 Octobre 2015 à 08:20

    Il y a effectivement " quelque chose" concernant Hephaistion au Musée Archéologique de Thessalonique : Est-ce ce relief ? Tu dois le savoir mieux que moi !

    3
    Jeudi 8 Octobre 2015 à 08:34

    Merci Kostas,  je viens de chercher : trouvé à Pella et déposé au Musée de Th. J'ai corrigé !

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